30 octobre 2022

Les-Francais-et-le-49-3

Les Français et le 49-3

Les Français favorables à un retour aux urnes

Suite à l’utilisation de l’article 49-3 par le Gouvernement, nous avons interrogé les Français sur leur perception de cette séquence ainsi que sur leur souhait de censure du Gouvernement et de dissolution de l’Assemblée Nationale. Une nette majorité de Français pense que le Gouvernement a eu tort d’utiliser cet article. Et une majorité d’entre eux souhaite également que les motions de censure aboutissent et que le Président de la République prononce la dissolution de l’Assemblée Nationale.

Précisons que cette enquête a été réalisée avant le dépôt et le vote des motions de censure par certains partis d’opposition. 

  • Le 49-3 rejeté par les Français

63% des Français interrogés pensent que le Gouvernement a eu tort d’utiliser l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire passer le projet de loi de finances. Cet article très contesté depuis son utilisation en 2015 et 2016 est synonyme de passage en force, voire de mesure « antidémocratique » pour une partie des Français.

Parmi les 31% de Français qui affirment que le Gouvernement a eu raison d’utiliser le « 49-3 », une majorité d’entre eux appartiennent à l’électorat du centre et de la droite. 87% des électeurs du 1er tour d’Emmanuel Macron et 67% des électeurs de Valérie Pécresse sont d’accord avec l’usage du « 49-3 ». En termes de clusters, Emmanuel Macron trouve, sur ce point, le soutien de son socle électoral de la dernière présidentielle. L’approbation est majoritaire chez les Progressistes, les Centristes, les Sociaux-Républicains, les Libéraux et même les Anti-Assistanat (un groupe qui subit fortement l’attraction de Marine Le Pen et du RN). On sent plus de réticence chez les Sociaux-Démocrates, cluster de gauche modérée, diplômée et aisée. Leur attachement au compromis et au dialogue social est ici mis à rude épreuve. 48% d’entre eux pensent que le Gouvernement a eu raison d’utiliser le « 49-3 » contre 43% qui pensent à l’inverse qu’il a eu tort.

Si l’utilisation du « 49-3 » ne menace pas l’assise électorale de la majorité présidentielle, c’est cependant un aveu de minorité au Parlement pour le Gouvernement. C’est le premier « incident » depuis la nomination d’Elisabeth Borne qui jusqu’ici n’avait pas été menacée par les oppositions.

  • Les Français favorables à la censure du Gouvernement

Une majorité de Français interrogés déclarent souhaiter qu’une motion de censure soit votée pour renverser le Gouvernement.

La rupture est nette ici entre clusters « anti-systèmes » et clusters « modérés ». Ce rapport aux institutions, aux « élites », au « système » est un des trois axes de clivage majeurs sur lesquels est produit notre test de clusterisation. La coalition électorale « macronienne » est né en 2017 sur cette base. Les « modérés », qu’ils soient de gauche ou de droite, ont adhéré à la candidature d’Emmanuel Macron et à La République en Mache par rejet des « populistes » et soucis de stabilité institutionnelle. Ainsi, les clusters Sociaux-Démocrates et Progressistes sont tout à fait opposés à un renversement du Gouvernement, à l’instar des Libéraux et des Centristes. L’ensemble de l’électorat d’Emmanuel Macron mais également celui de Valérie Pécresse et dans une moindre mesure celui d’Anne Hidalgo et de Yannick Jadot sont opposés à la motion de censure, démontrant la force de la demande de stabilité comme vecteur de coagulation politique. Le rejet des populismes est au moins aussi puissant que le rejet du système exprimé par les clusters radicaux de l’électorat Mélenchon, Le Pen et Zemmour. Les clusters « mélenchonistes » Révoltés, Multiculturalistes, Solidaires qui forment le noyau dur de l’électorat insoumis sont les plus favorables à la censure de même que les Sociaux-Patriotes, les Réfractaires et les Eurosceptiques, trois clusters populaires très favorables à Marine Le Pen.

On comprend mieux pourquoi Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont été les plus prompts à se prononcer en faveur d’une motion de censure, cette dernière allant même jusqu’à voter la motion de la NUPES. Bien que notre enquête ait été réalisée avant cette motion de censure, il y a de fortes chances que l’électorat de Marine Le Pen soit tout à fait favorable à ce qu’elle ait voté la motion de la NUPES.

  • Les Français prêts à retourner aux urnes

Une partie significative des Français semble ne pas se reconnaître dans l’Assemblée nationale actuelle. 52% se disent favorables à une dissolution de l’Assemblée Nationale. Malgré le contexte déjà chargé de nombreuses incertitudes, seuls 41% s’y opposent, 7% se déclarent sans opinion.

On retrouve peu ou prou les mêmes équilibres politiques que dans les deux questions précédentes. Plus on est modérés, moins on souhaite la dissolution. On observe tout de même une envie de dissolution dans une large part de l’électorat, y compris dans certains segments comme les Sociaux-Démocrates ou les Conservateurs, deux clusters pourtant peu enclins aux grands bouleversements.

En somme, ce qui est à retenir, c’est la grande stabilité des rapports de force politique dans le pays. Les électorats des élections présidentielle et législatives restent soudés. La tripartition de l’électorat demeure, ce qui compte particulièrement pour Emmanuel Macron qui doit faire face aux risques de fronde et d’instabilité au sein de sa majorité ; des menaces qui n’existaient pas au cours du précédent quinquennat. Une dislocation de sa majorité relative pourrait fragiliser grandement son noyau dur qui, nous l’avons dit, repose sur l’alliance des modérés de droite et de gauche. Ces derniers, davantage sensibles aux compromis et au respect de la démocratie pourraient se montrer réticents à un usage trop fréquent du 49-3.

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