Baromètre hebdomadaire S05 : Présidentielle 2022
Réalisé en partenariat avec Marianne
ERIC ZEMMOUR ET MARINE LE PEN A EGALITE POUR LA QUALIFICATION AU 2ND TOUR
Cette semaine, notre baromètre se caractérise par des variations sensibles pour quelques candidats. Cependant, nous observons une concurrence toujours aussi rude pour la qualification au 2nd tour : derrière Emmanuel Macron largement en tête à 23% (+0,5), Éric Zemmour et Marine Le Pen sont à égalité à 15,5% et gagnent tous deux un point par rapport à la semaine dernière. Valérie Pécresse recule très légèrement à 13,5% (-0,5) et reste très proche de ses deux principaux concurrents.
A gauche, malgré sa victoire à l’issue de la Primaire Populaire, Christiane Taubira subit un recul de 3 points, dépassée par Yannick Jadot et Fabien Roussel. Ce dernier est le seul candidat de gauche en progression à 3,5% (+1,5).
Derrière Emmanuel Macron, le match Zemmour-Le Pen toujours aussi tendu
Emmanuel Macron gagne à nouveau 0,5 point cette semaine et fait la course en tête à 23% malgré une candidature toujours en suspens. La stabilité de son socle électoral est observable au sein de ses clusters décisifs. Ainsi, il demeure le candidat préféré des Sociaux-Démocrates, des Progressistes, des Centristes, des Apolitiques et des Sociaux Républicains. Il maintient son socle également chez les Libéraux et les Conservateurs et fait ainsi quasiment jeu égal avec Valérie Pécresse dans ces clusters qui appartiennent pourtant à la grande famille de la droite.
Derrière lui, Éric Zemmour et Marine Le Pen se retrouvent pour une deuxième semaine consécutive à égalité à 15,5 en progression d’un point. La séquence médiatique qui a donné lieu à une bataille de ralliements n’a pour l’heure pas affaibli Marine Le Pen. La candidate du RN bénéficie, en effet, d’un socle solide dans ses clusters décisifs : Réfractaires, Eurosceptiques et Sociaux-Patriotes. Ces clusters composent un électorat populaire et « dégagiste » qui ne s’identifie plus dans le clivage gauche-droite ; c’est un électorat que Marine Le Pen a fidélisé au cours des dernières années. Cependant, la concurrence d’Éric Zemmour commence à se faire ressentir en particulier chez les Eurosceptiques. Ce cluster est un des deux clusters les plus populaires et c’est également le moins diplômé : 88% ont un niveau de diplôme inférieur au Bac. C’est un cluster en forte demande de protections économiques et culturelles. La candidate du Rassemblement National et celui de « Reconquête ! » ont des dynamiques inversées au sein de ce cluster. Alors que Marine Le Pen devançait son concurrent de plus de 40 points dans ce groupe début janvier, il n’y a plus aujourd’hui qu’une dizaine de points d’écart au bénéfice de Marine Le Pen. Il convient d’être prudent et de vérifier si cette tendance se poursuit dans les prochaines semaines, mais c’est un signal important car l’électorat populaire de Marine Le Pen semblait jusqu’ici hors de portée d’Éric Zemmour. Par ailleurs, Éric Zemmour retrouve son niveau de l’automne chez les Identitaires. Il est plébiscité par un électeur sur deux appartenant à ce cluster. Enfin, Éric Zemmour parvient à réunir une fraction, certes minoritaire, des clusters de droite modérée : les Conservateurs et les Libéraux, avec environ 20% des intentions de votes au sein de ce dernier dont on sait qu’il est le segment de l’électorat qui s’abstient le moins et également celui qui vote traditionnellement le plus massivement et le plus régulièrement pour le candidat LR. Rappelons que les Libéraux avaient voté à 60% pour François Fillon en 2017.
Valérie Pécresse ne parvient toujours pas à impulser une dynamique
Valérie Pécresse est cette semaine à 2,5 points du 2nd tour derrière Éric Zemmour et Marine Le Pen. Elle reste très largement dans la course au 2nd tour, mais contrairement à ses deux principaux concurrents, elle peine à se démarquer nettement au sein d’un ou plusieurs clusters. Elle est la candidate préférée des Conservateurs et des Libéraux mais dans chacun de ces deux clusters avec une très courte avance, car elle est fortement concurrencée par Emmanuel Macron qui fait quasiment jeu égal avec elle. Pour la candidate LR, les choses sont délicates : il lui faut reconstituer le vote Fillon 2017 si elle veut se qualifier au 2nd tour mais la concurrence est bien plus intense qu’en 2017. Il y a 5 ans, Emmanuel Macron était un candidat identifié comme social-démocrate, ex-ministre d’un gouvernement socialiste. Aujourd’hui, il est soutenu par des figures issues de la droite et semble avoir acquis un socle solide dans ces clusters. De l’autre côté de la tenaille, Éric Zemmour et Marine Le Pen empêchent la progression de Valérie Pécresse au sein des Anti-assistanat et des Identitaires qui avaient voté à 26% et 33% en faveur de François Fillon en 2017. C’est dans le cluster des Identitaires que sa progression semble la plus compliquée en raison de « l’embouteillage » de l’offre politique sur ce segment. Elle se situe ainsi en 3e position derrière Éric Zemmour et Marine Le Pen, à moins de 20% des intentions de vote dans ce cluster.
A gauche : Taubira chute, Roussel grimpe
Notre premier baromètre depuis la Primaire Populaire montre une chute importante de Christiane Taubira dans les intentions de vote. Elle perd 3 points et se retrouve à 3% derrière Yannick Jadot et désormais Fabien Roussel. La contestation massive de la légitimité de la Primaire opérée par les principaux candidats de gauche, ainsi que sa séquence médiatique délicate à l’issue de cette investiture semble avoir affecté massivement son électorat. Cette chute confirme nos études précédentes qui révélaient que l’électorat de Christiane Taubira était l’un des moins « certains de son choix », donc l’un des plus volatiles. C’est logiquement au sein de ses clusters clés que Christiane Taubira a perdu le plus de soutiens. Elle divise son score par deux chez les Multiculturalistes, les Sociaux-Démocrates, les Progressistes et les Solidaires. Si cette tendance venait à se poursuivre, cela réouvrirait de l’espace pour ses concurrents de gauche et en particulier pour Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot, mais aussi pour Emmanuel Macron car Christiane Taubira pourrait représenter une menace sur deux clusters phares de sa coalition électorale : les Sociaux-Démocrates et les Progressistes.
Jean-Luc Mélenchon demeure stable à 13% soutenu par un socle solide au sein des clusters Multiculturalistes, Solidaires et Révoltés, soit des clusters orientés à gauche et en demande de changements radicaux. Quasiment un électeur sur deux a l’intention de voter pour lui au sein de ces trois clusters qui constituait déjà la part la plus importante de son vote en 2017. La solidité de ce socle lui permet de garder une avance sur ses concurrents de gauche mais se révèle insuffisante à lui faire passer la barre du 1er tour.
Notons enfin la progression très sensible de Fabien Roussel à 3,5%. Le député du Nord qui est candidat pour la première fois à l’élection présidentielle est le seul candidat de gauche à bénéficier d’une progression dans les intentions de vote cette semaine (+1,5). Ses récentes sorties médiatiques lui ont permis d’élargir sa notoriété et d’envisager le début d’une dynamique au sein de clusters stratégiques. Ainsi il est en hausse au sein de tous les clusters qui votent traditionnellement à gauche. En particulier chez les deux clusters les plus radicaux : Les Multiculturalistes et les Solidaires. Ce dernier correspond au cluster de la « gauche de classe », radical sur la question sociale, antilibéral et anti-élite, mais relativement moins sensible que les autres clusters de gauches aux questions culturelles et identitaires. De même, on observe une percée du candidat communiste au sein du cluster des Sociaux-Républicains qui correspond à un électorat plus rural et modéré, légèrement conservateur sur les questions culturelles mais orienté à gauche sur les questions économiques.
En somme, il n’y a pas de changement de tendance brutal cette semaine si ce n’est le recul important de Christiane Taubira, un possible début de dynamique en faveur de Fabien Roussel et la légère progression des deux candidatures identitaires qui pour l’instant font jeu égal dans notre étude.