Laurent Berger et Philippe Martinez, les deux gauches réconciliées ?
Unis dans un même mouvement social pour la première fois depuis qu’ils ont pris les commandes de leur centrale respective, les deux leaders syndicalistes obtiennent des scores de popularité relativement élevés, dans un contexte favorable de mobilisation contre une réforme impopulaire.
- Laurent Berger, leader consensuel
48% des Français interrogés disent avoir une bonne opinion de Laurent Berger, 23% une mauvaise opinion et 29% disent ne pas le connaître assez.
Les résultats sont cohérents avec la ligne réformiste de la CFDT. En effet, les bonnes opinions à l’égard du syndicat comme de son secrétaire national se répartissent de façon relativement homogène dans le champ électoral. Ainsi, Laurent Berger est d’abord apprécié par les électeurs de Yannick Jadot, Anne Hidalgo et Fabien Roussel, à plus de 70%, mais également par 58% des électeurs de Valérie Pécresse et 51% des électeurs d’Emmanuel Macron. Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon sont « seulement » 51% à avoir une bonne opinion de Laurent Berger. Cette relative impopularité se manifeste en particulier dans le cluster des « Multiculturalistes », qui est un groupe radicalement de gauche, jeune, mobilisé, citadin, dont la sociologie ressemble beaucoup à celle des participant au mouvement « Nuit Debout » qui avait germé suite à la loi travail. Une loi travail qui a engendré un large rejet du PS et de la CFDT au sein de cette gauche « mélenchonniste ».
En somme, Laurent Berger parvient tout de même à séduire un large arc de la population. Pour autant, les Français ne semblent pas prêts à le voir sauter le pas et à entrer dans l’arène politique. Seuls 11% des personnes interrogées estiment ainsi qu’il ferait « un bon candidat » à l’élection présidentielle, un score qui s’élève à 26% et 29% chez les électeurs d’Anne Hidalgo et Yannick Jadot.
- Philippe Martinez, leader clivant
Philippe Martinez est apprécié par une proportion moindre de la population que Laurent Berger, et avec des écarts beaucoup plus tangibles en fonction de l’appartenance politique.
38% des Français déclarent avoir une bonne opinion du leader cégétiste. Philippe Martinez est davantage identifié et apprécié par la gauche radicale. Il recueille ainsi 73% de bonnes opinions chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon et 64% chez les électeurs de Fabien Roussel.
Les trois clusters qui ont le plus voté Jean-Luc Mélenchon sont également les trois clusters qui apprécient le plus Philippe Martinez. Il totalise ainsi entre 54% et 78% de soutien chez les Solidaires, les Multiculturalistes et les Révoltés, trois clusters totalement opposés à la réforme des retraites et plus globalement à l’ensemble des réformes économiques menées par le Président de la République. Trois clusters qui ont également massivement soutenu les gilets jaunes. D’ailleurs, il convient de souligner que Philippe Martinez est apprécié par une partie substantielle de l’électorat « lepéniste » populaire, issu de la « France des ronds-points ». Ainsi, 49% des Réfractaires et 47% des Eurosceptiques, deux groupes composés en majeure partie d’ouvriers et d’employés qui votent majoritairement RN, disent avoir une bonne opinion de Philippe Martinez.
En somme, Philippe Martinez est apprécié par un arc contestataire pluriel qui mêle la sociologie du mouvement « Nuit Debout » et une sociologie plus proche de la « France gilets jaunes ».
A eux deux, Laurent Berger et Philippe Martinez séduisent un spectre important de la population, dans un contexte favorable aux syndicats et au mouvement social.