Analyses

Note Fondation Jean Jaurès Cluster 17

Note pour la Fondation Jean-Jaurès : À un an des municipales, les grandes villes face à la triple polarisation identitaire, sécuritaire et écologique

À un an des élections municipales, Jean-Yves Dormagen, Président de Cluster 17 et Stéphane Fournier, directeur d’études de Cluster 17 publient une note pour la Fondation Jean-Jaurès sur les dynamiques de l’opinion à l’approche des municipales. Les grandes villes françaises deviennent le théâtre d’un affrontement structuré par trois grandes lignes de fracture : l’identité, la sécurité et l’écologie.

En 2020, la « vague verte » avait marqué les esprits. Le contexte politique et médiatique était alors favorable à l’écologie. Cinq ans plus tard, le contexte a radicalement changé : l’écologie est devenue un sujet clivant, au croisement de tensions sociales, culturelles et politiques. Notre test de 30 questions soumis à des dizaines de milliers d’individus montre que l’adhésion ou le rejet des politiques environnementales est aujourd’hui fortement corrélé aux valeurs identitaires et sécuritaires.

Cette triple polarisation structure désormais également le paysage électoral local :


• À droite, le « backlash » anti-écolo et sécuritaire est le principal moteur de mobilisation. Dans les villes gouvernées par la gauche, les électeurs modérés et du centre partagent de plus en plus les opinions de la droite conservatrice sur ces sujets.


• À gauche, les fractures internes s’accentuent : Les deux clusters les plus progressistes de notre segmentation les Multiculturalistes et les Solidaires sont sur-représentés dans les grandes métropoles et les villes de banlieue. C’est ce qui explique en premier lieu la montée en puissance de LFI. Une progression qui modifie les équilibres au sein des coalitions municipales, LFI étant aujourd’hui une force disposant d’un socle électoral solide souvent supérieur à 10% dans ces communes.


• Le centre (Renaissance) apparaît affaibli, sans ancrage local solide, souvent réduit à un rôle de force d’appoint. Dans les grandes villes, son électorat est très proche de celui des Républicains. A un an de la présidentielle, le « récit » au soir du 2nd tour des municipales sera décisif. Si Les Républicains, avec l’appui du bloc central, se trouvaient dans une situation favorable, en ayant gagné quelques villes emblématiques, Bruno Retailleau en sortirait alors probablement encore renforcé.

Enfin, La prime au sortant semble s’effriter sous l’effet de cette polarisation : . Dans les grandes villes, le niveau de contestation à l’égard des maires en place est souvent très élevé et comparable à celui des élus nationaux.
La figure du maire « consensuel », « au-dessus de la mêlée » que nous observons dans la plupart des communes est plus rare dans les villes supérieures à 100 000 habitants.

Retrouvez la note complète sur le site de La Fondation Jean-Jaurès :

https://www.jean-jaures.org/publication/a-un-an-des-municipales-les-grandes-villes-face-a-la-triple-polarisation-identitaire-securitaire-et-ecologique/

Vote seniors RN Cluster 17

Comment le RN est devenu le premier parti chez les seniors ? Note d’analyse pour la Fondation Jean-Jaurès

👉 Lire la note complète ici : Du vote légitimiste au vote identitaire : comment le RN est devenu le premier parti chez les seniors

Résumé :

Le RN est aujourd’hui le premier parti chez les retraités. Un phénomène analysé dans une note publiée pour la Fondation Jean-Jaurès par Stéphane Fournier, doctorant en science politique et analyste chez Cluster17. À partir des données Cluster17 et d’entretiens qualitatifs, il montre comment ce basculement s’est opéré.

Longtemps acquis à la droite républicaine, l’électorat des plus de 65 ans a peu à peu délaissé les partis traditionnels. Ce « vote légitimiste » — c’est-à-dire la fidélité aux sortants notamment à la droite et au centre-droit de gouvernement— s’effondre. À sa place, un vote plus marqué, plus clivé, qui penche de plus en plus du côté du Rassemblement National.

La progression du RN s’explique notamment par un fort conservatisme des seniors sur les sujets identitaires : immigration, islam, sécurité. Le « grey gap » est très net dans les chiffres : 84 % des seniors se disent ainsi par exemple favorables à l’interdiction du voile à l’université, contre 30 % chez les jeunes.

Le RN a su capter cette demande en adaptant son image et « nettoyant » son programme. Marine Le Pen a ainsi abandonné certains marqueurs perçus comme trop radicaux et qui pouvaient cliver les différentes sensibilités électorales de la droite, notamment les plus âgés et les plus libéraux économiquement (sortie de l’euro, retraite à 60 ans, alignement sur Moscou). En recentrant son discours et ses prises de position clivantes sur deux thématiques, celles de l’immigration et de la sécurité, le RN a su agréger des électeurs pour qui ces sujets sont absolument centraux dans le choix de vote.

Toutefois, la note se conclue sur les quelques limites qui subsistent. Le RN reste faible chez les « grands aînés » (75 ans et plus), et chez les retraités aisés, diplômés et plus modérés culturellement. Par ailleurs, une partie de cet électorat reste fidèle aux Républicains ou au bloc « macroniste ». Pour l’instant.

Le paysage politique pourrait encore évoluer si une alternative crédible à droite émergeait à l’issue du congrès des Républicains ou si le RN se voyait « rediaboliser » par la condamnation de Marine Le Pen. Mais en attendant, c’est bien le RN qui capitalise sur la déception à l’égard du bilan d’Emmanuel Macron et sur la polarisation à l’œuvre sur les questions identitaires.

Sondage entreprise cluster 17 The Arcane Fondation Jean Jaurès

Etude pour The Arcane et la Fondation Jean-Jaurès : L’entreprise, une institution « refuge » dans un climat de défiance et d’instabilité ?

Dans un contexte de défiance vis-à-vis des institutions politiques, l’entreprise s’impose comme une institution « refuge », perçue à la fois comme un lieu de protection, d’utilité sociale et de pouvoir concret. Longtemps ambivalent, le rapport des Français au secteur privé semble évoluer : l’entreprise est désormais investie d’attentes collectives – créer de la richesse, préserver l’environnement, défendre le patriotisme économique – tout en restant le cadre d’un accomplissement personnel. Ce recentrage sur l’entreprise comme acteur central de la société reflète l’érosion de la légitimité des élus et de l’État, désormais concurrencés sur le terrain symbolique par les grandes figures du capitalisme. Si les Français plébiscitent les TPE-PME, ils attendent aussi des grandes entreprises qu’elles assument une part de leadership public sans pour autant empiéter sur le débat politique. Ce nouvel imaginaire du travail valorise l’autonomie, les relations humaines et le sens, tout en réclamant à la fois moins d’impôts sur les entreprises et moins d’aides publiques. L’entreprise apparaît ainsi comme l’un des rares espaces où se conjuguent efficacité, sécurité et horizon collectif, au moment où les autres piliers du contrat social vacillent.

Les chiffres clés de l’étude :

  • Confiance dans les entreprises :

Moyenne de confiance : 6,1/10 — Les entreprises arrivent en 4e position derrière l’armée (7,4), la police (7,1) et l’hôpital public (6,9).

  • Fiscalité :

52 % des Français estiment que les entreprises paient trop d’impôts et de charges, contre seulement 17 % qui pensent qu’elles n’en paient pas assez. Mais « en même temps », 48 % considèrent que les entreprises reçoivent trop d’aides publiques, contre 7 % qui pensent qu’elles n’en reçoivent pas assez.

  • Pouvoir des grandes entreprises :

49 % des Français pensent que les dirigeants des grandes entreprises ont plus de pouvoir que les responsables politiques. 55 % estiment que Bernard Arnault a plus de pouvoir qu’Emmanuel Macron.

  • Engagement des entreprises sur les sujets de société :
    Les Français soutiennent majoritairement l’implication des entreprises sur certains sujets :

👉 80 % pour l’égalité femmes-hommes

     👉 75 % pour le patriotisme économique

     👉 74 % pour la lutte contre le réchauffement climatique

     👉 Seuls 14 % estiment qu’elles doivent s’impliquer dans la participation citoyenne (vote, engagement associatif ou politique).

  • « Travailler plus pour gagner plus » :

53 % des Français y sont favorables, contre 44 % qui y sont opposés.

  • Relations de travail

83 % des Français déclarent avoir des relations humaines de qualité dans leur travail.

57% disent avoir des collègues de travail parmi leurs amis.

65% des sondés disent parler politique au travail.

  • Trump et la guerre commerciale :

77 % des Français pensent que son retour au pouvoir est une menace pour les entreprises françaises exportant aux États-Unis.

66 %  des sondés sont favorables à un allègement des normes pour améliorer la compétitivité.

78 % veulent instaurer des barrières douanières pour taxer les produits importés.

L’étude complète :

europe sondage défense cluster 17

Mesurer le sursaut européen des Français face à Trump, 10 points à partir de notre sondage exclusif Eurobazooka

Alors que l’Europe et le monde se transforment à une vitesse vertigineuse, l’opinion française se structure autour de lignes de plus en plus figées.

L’étude granulaire des données socio-politiques et électorales de notre grand sondage Eurobazooka le montre : la gauche et le centre sont alignés sur une large gamme de questions de politiques étrangères — plus d’Europe et moins d’États-Unis contre la Russie de Poutine.

Aux marges de ce vaste consensus, les électeurs RN et Reconquête sont ceux qui ont le plus de mal à considérer Trump comme un ennemi.

Jean-Yves Dormagen et Stéphane Fournier analysent ces phénomènes pour la revue en ligne Le Grand Continent.

Analyse et résultats complets à retrouver sur leur site :

https://legrandcontinent.eu/fr/2025/04/08/mesurer-le-sursaut-europeen-des-francais-face-a-trump-10-points-a-partir-de-notre-sondage-exclusif-eurobazooka/

Brussels,,belgium, ,08,04,2023:,the,european,parliament,headquarters.

Sondage dans 9 pays européens avec Le Grand Continent : L’effet Trump sur l’opinion publique européenne

Pour comprendre et mesurer les nouveaux clivages et une nouvelle convergence, le Grand Continent et Cluster 17 lancent une première enquête d’opinion à l’échelle du continent sur les grandes questions de notre temps.

Points clefs

Le parapluie nucléaire français est largement plébiscité  : plus de 6 Européens sur 10 y sont favorables.

La guerre sur le sol de l’Union s’approche  : une majorité d’Européens (55 %) pense que le risque d’un conflit armé sur le territoire de l’Union dans les prochaines années est élevé.

Trump est un « ennemi »  : une majorité d’Européens considère Donald Trump comme un « ennemi de l’Europe » (51 %) et 63 % que l’élection de Donald Trump rend le monde moins sûr, 43 % considèrent que le président américain a une tendance autoritaire et 39 % qu’il se comporte en dictateur. 

Les Européens veulent boycotter Musk et Tesla : près de 8 Européens sur 10 considèrent qu’on ne peut pas lui faire confiance (79 %) et 58 % des sondés se déclarent favorables au boycott de Tesla.

Le soutien pour un bond en avant dans la défense est largement majoritaire : 70 % estiment que l’Union européenne ne doit compter que sur ses propres forces pour assurer sa sécurité et sa défense

Vers l’armée européenne : les Européens ont plus confiance en une armée commune européenne (60 %) qu’en leur armée nationale (19 %) pour assurer la sécurité de leurs pays.

Les Européens soutiennent très largement la saisie des avoirs russes : 61 % d’Européens se déclarent favorables à la saisie des avoirs russes gelés et à leur utilisation pour financer le soutien à l’Ukraine

Accord de paix en Ukraine : 47 % des personnes interrogées estiment que l’Ukraine doit accepter de signer un traité de paix même si cela doit la conduire à céder la partie de son territoire occupé par la Russie.

Les résultats et notre analyse sont à retrouver sur le site du Grand Continent

https://legrandcontinent.eu/fr/2025/03/20/les-europeens-face-a-la-guerre-et-trump-10-points-sur-un-sondage-exclusif
Scientist,using,microscope,in,laboratory.,close Up,of,a,researcher's,hands

Les Français et la science : un rapport marqué par des fractures et des paradoxes

L’enquête menée par Cluster17 dans le cadre du Paris-Saclay Summit Choose Science met en évidence une relation ambivalente des Français à la science. D’un côté, une large majorité la considère comme une source fiable de connaissances et un outil essentiel pour relever les défis contemporains. De l’autre, des clivages marqués apparaissent sur certaines thématiques, notamment en fonction du niveau d’éducation et des orientations politiques.

Le niveau de connaissance scientifique des Français s’avère globalement moyen, avec une note moyenne de 11,3/20 sur l’ensemble des questions soumises aux sondés. Les écarts sont significatifs selon le niveau de diplôme : les détenteurs d’un bac +5 obtiennent une moyenne de 13,5/20, tandis que les non-diplômés plafonnent à 7,8/20. Une fracture générationnelle se dessine également : les 18-24 ans affichent la meilleure note, avec 12,4/20, mais ce sont aussi eux qui expriment le plus de critiques sur les applications technologiques. Par ailleurs, certaines idées fausses persistent, notamment sur des sujets de santé publique. Près d’un quart des sondés ignorent encore que les antibiotiques ne sont efficaces que contre les bactéries. Concernant le changement climatique, 83 % des Français reconnaissent l’impact majeur des activités humaines, mais 17 % continuent d’attribuer ce phénomène à des cycles naturels ou à des variations du rayonnement solaire.

Malgré ces lacunes, la confiance envers la science demeure forte. 88 % des Français estiment qu’elle constitue une source fiable d’information, et 95 % considèrent qu’elle doit rester une priorité budgétaire nationale. Cette adhésion est cependant nuancée par des doutes sur l’intégrité des chercheurs, en particulier chez les groupes se positionnant comme « antisystème ». Si 85 % des sondés estiment que la science est un levier essentiel pour lutter contre le réchauffement climatique, 65 % considèrent néanmoins qu’elle ne suffira pas à elle seule à résoudre ce problème.

Le clivage politique joue un rôle important dans la perception des enjeux scientifiques. La reconnaissance du rôle humain dans le réchauffement climatique varie fortement selon les sensibilités partisanes. Elle atteint 99 % chez les sympathisants EELV, mais tombe à 57 % chez les électeurs du Rassemblement National. De manière plus générale, 97 % des Français estiment que la science améliore la qualité de vie, mais près de la moitié jugent que ses effets dépendent avant tout de la façon dont elle est utilisée et réglementée.

Une méfiance spécifique émerge autour des nouvelles technologies, et la volonté de les encadrer plus strictement varie en fonction des appartenances politiques. 30 % des électeurs de LFI ou EELV souhaitent une régulation forte du développement technologique, notamment dans des domaines comme l’intelligence artificielle ou le génie génétique. Cette proportion tombe à 21 % chez les électeurs du RN, et à 5 % chez les sympathisants LR et 6 % chez ceux de Renaissance. Dans l’ensemble, 19 % des Français estiment qu’il faudrait limiter significativement les innovations technologiques.

L’étude met également en lumière une évolution majeure : la défiance envers la science ne se limite plus aux milieux conservateurs ou religieux. Une forme de scepticisme « éclairé » se développe au sein des classes moyennes et des diplômés intermédiaires, qui se montrent particulièrement prudents à l’égard des innovations scientifiques. Ce phénomène se manifeste notamment sur les sujets environnementaux et sanitaires. La question des vaccins illustre bien ces divergences : 62 % des Français déclarent leur faire totalement confiance, mais ce chiffre masque d’importantes variations en fonction des sensibilités politiques.

En définitive, si la science bénéficie encore d’un fort capital de confiance en France, les perceptions divergent de plus en plus selon les appartenances sociales et idéologiques. Elle n’est plus perçue comme un élément neutre et universel, mais comme un enjeu politique structurant, cristallisant des visions parfois antagonistes de la société et du progrès.

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Une nouvelle clusterisation pour un niveau d’analyse toujours plus puissant

En ce début d’année 2025, Cluster 17 a le plaisir de vous présenter une mise à jour de sa segmentation de l’opinion en 16 groupes de citoyens partageant des valeurs et des positionnements communs sur les grands clivages. La recherche scientifique étant au cœur même de la création de Cluster 17, nous adaptons nos outils au fur et à mesure que nous grandissons. Après 3 ans de fonctionnement, cette évolution va nous permettre d’accompagner de façon toujours plus efficace nos partenaires et nos clients, de plus en plus nombreux dans tous les domaines qui s’intéressent à la société et ses transformations.

Les 16 nouveaux clusters

Les clusters

Pourquoi une nouvelle clusterisation ?

  1. Amélioration du questionnaire

Nous avons amélioré notre test de 30 questions clivantes à partir duquel nous faisons notre analyse factorielle nécessaire à la clusterisation des individus, c’est-à-dire au regroupement des individus partageant des réponses proches sur ces 30 questions.

Les questions de l’ancien test n’étaient pour partie plus adaptées, soit tout simplement parce qu’elles n’étaient plus aussi prégnantes dans la société soit parce qu’elles étaient trop consensuelles et ne permettaient dès lors pas de « discriminer » des systèmes de valeurs.

En outre, après plusieurs tests, nous avons intégré de nouvelles questions adaptées aux nouveaux enjeux clivants qui traversent la société française.

  • Répondre aux transformations de l’électorat

Dans le cadre de nos recherches et de nos sondages réalisés au cours de ces trois dernières années, nous nous sommes aperçus que les individus étaient de plus en plus polarisés. Ainsi, lorsque nous reproposons le test originel des clusters à des individus l’ayant déjà passé, cette dynamique de polarisation est clairement mesurable. Certains groupes notamment les plus « radicaux » de la segmentation (Les Multiculturalistes, les Libéraux et les Identitaires) voient ainsi leur proportion progresser nettement sous l’effet de la polarisation identitaire. A titre d’exemple, après reclusterisation de 40 000 individus ayant passé le test en 2021 puis en 2024, le cluster des Identitaires passe de 13 à 18%, celui des Multiculturalistes de 7 à 12%. Dès lors, les clusters étaient devenus déséquilibrés entre eux et ne répondaient plus aussi bien au besoin de granularité et de finesse d’analyse pour lequel ils ont été créés.

C’est notamment au sein de l’espace conservateur qu’il était devenu nécessaire de faire mieux apparaître les nuances entre les différentes grappes d’électeurs en captant mieux les clivages internes à cet espace dont la polarisation est manifeste depuis trois ans.

Dès lors, notre nouvelle segmentation fait apparaître de nouveaux groupes tels que les « Autoritaires » ou les « Traditionalistes » disposant chacun d’un système de valeurs et d’une sensibilité idéologique spécifiques.

  • Mieux comprendre les dynamiques électorales
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Cette nouvelle segmentation permet de mieux reconstituer encore la tripartition de l’électorat. Les deux « axes » clivants les plus discriminants et sur lesquels se répartissent les clusters demeurent d’une part les questions culturelles au sens large (immigration, sécurité, religion…) et d’autre part les questions relatives au rapport au « système » économique et institutionnel (Union Européenne, redistribution des richesses, révocation des élus…). Notons que les questions écologiques sont plus centrales qu’auparavant dans la constitution des clivages et donc des clusters et qu’elles sont très fortement corrélés aux questions culturelles et identitaires. Autrement dit, progressisme et écologisme vont de pair de même que climato-relativisme et identitarisme sont étroitement corrélés.

A l’issue de cette segmentation, 3 espaces électoraux apparaissent assez nettement (graphique 1) bien que ceux-ci soient en proie à des recompositions continues sous l’effet de l’éclatement de l’espace « central-élitaire ».

  • La gauche clivée entre ses composantes radicales et modérées

Dans cette nouvelle clusterisation, il apparait que le barycentre de l’électorat de gauche se décale assez nettement, avec deux groupes : les Multiculturalistes et les Solidaires (en bas à gauche sur le graphique), qui pèsent 15% de l’électorat et qui se caractérisent par des positions très progressistes, voire « avant-gardistes », sur les questions de genre, d’immigration, d’égalité et d’écologie, tout en affichant une forte demande de rupture avec un « système » qu’ils contestent foncièrement. Les Sociaux-Démocrates occupent eux aussi une place importante au sein de la gauche, pesant environ 10% de l’électorat total. Progressistes culturellement mais beaucoup plus confiants dans le « système » économique et politique que leurs « voisins » précités, ils oscillent entre le bloc central et le bloc de gauche. C’est également le cas pour les Modérés (6% de l’électorat). Les Sociaux-Républicains (6%) et les Révoltés (4%) sont quant à eux solidement ancrés dans le bloc de gauche malgré leurs positionnements bien plus modérés, voire ambivalents, sur les questions d’immigration, de genre, de sécurité et leur souci d’une écologie « non punitive ».

  • Un espace central soumis à des tendances centrifuges

Un large espace modéré se dégage et le vote en faveur du bloc central est beaucoup plus homogène et concentré dans la nouvelle clusterisation. Comme le montrent les graphiques 2 et 3 ci-dessous, cet espace se compose de l’ensemble des clusters « centraux », modérés sur le clivage identitaire culturel et occupant les positions « supérieures » de l’espace factoriel, c’est-à-dire très favorables à la stabilité politique et économique. Ces 5 clusters (Sociaux-Démocrates, Modérés, Apolitiques, Centristes et Libéraux) ont soutenu, dans des proportions importantes, Emmanuel Macron en 2022. Toutefois, en l’espace de deux ans, la relative « droitisation » du macronisme incarnée par l’adoption quasi simultanée de la réforme des retraites et de la loi immigration a suscité des tensions au sein de cet espace central. La concurrence accrue lors des élections Européennes sur sa gauche, incarnée par la liste de Raphaël Glucksmann et sur sa droite, incarnée par un RN toujours moins radical, a conduit à une forme d’éclatement de ce bloc « macroniste » qui résiste principalement sur deux clusters très proches l’un de l’autre dans l’espace des clivages : les Libéraux et les Centristes.

Graphique 2 : candidats arrivés en tête par cluster à la présidentielle 2022

Coalitions P22

Graphique 3 : liste arrivée en tête par cluster aux élections européennes 2024

Coalitions E24
  • Le Rassemblement National quasi-hégémonique dans l’espace des droites

En l’espace de deux ans, le RN a approfondi sa conquête. Comme le montre le graphique 2, Marine Le Pen était déjà parvenue dès 2022 à coaliser l’ensemble des clusters les plus « à droite » sur l’axe des valeurs culturelles, des plus élitaires et libéraux (clusters Traditionalistes, Anti-Assistanat et Identitaires) aux clusters plus protestataires et étatistes (Autoritaires, Réfractaires, Sociaux-Patriotes).

Sous l’effet concomitant du renoncement aux aspects les plus clivants de son programme et du « recentrage » de son programme à ses aspects les plus à même de coaliser un vaste espace de droite (l’immigration et la sécurité en premier lieu), le RN a nettement progressé dans l’espace électoral en 2024, parvenant à se hisser en tête dans deux clusters modérés et relativement dépolitisés : les Conservateurs et les Apolitiques. Si le vote des premiers est assez « logique » dans la mesure où leur système de valeurs est propice à un vote RN (conservatisme social, patriotisme, défenseurs de politiques sécuritaires et anti-immigration dures), le vote des seconds acte un nouveau chapitre de la progression du RN. En effet un cluster comme les Apolitiques, comme son nom l’indique, n’est pas porteur d’un système de valeurs très marqué. Cela démontre la capacité nouvelle du RN à séduire des électeurs modérés et à entrer en concurrence avec des offres politiques avec lesquelles il n’était jamais en concurrence auparavant : Renaissance et le Parti Socialiste en l’occurrence qui sont arrivés 2e et 3e dans ce cluster lors des Européennes.

Le cluster Traditionaliste (en bleu ciel sur le graphique 3) est quant à lui assez singulier dans la mesure où il est le seul à avoir placé LR en tête aux européennes mais à égalité avec Reconquête (32%) et juste devant le RN (29%). Cela montre qu’il existe encore une maigre concurrence dans ce petit espace de droite très conservatrice et bourgeoise quand bien même dans le cadre d’une offre resserrée, ceux-ci seraient inéluctablement attirés par un « vote utile » en faveur du RN. Dans ce cluster, Reconquête apparaît comme une sorte de « passerelle » vers le RN.

  • La puissance d’un outil de détection des systèmes de valeurs


Notre nouvelle clusterisation confirme la pertinence d’une lecture de l’opinion par le prisme des systèmes de valeurs, eux-mêmes repérables via les positions des individus sur les enjeux clivants les plus saillants.

Autrement dit, en détectant grâce à notre test les valeurs, les opinions, les ressorts profonds des individus et en les regroupant à partir de ce qu’ils pensent et non de ce qu’ils sont ou de ce qu’ils font, nous disposons d’un outil d’analyse qui se révèle extrêmement puissant. Car il permet à la fois de mieux comprendre les demandes citoyennes mais aussi des les anticiper. Nous pourrions résumer la force de l’outil cluster par cette formule : « Dis-moi comment tu te positionnes sur quelques sujets clivants et je te dirai quel est ton système de valeurs, donc pour qui tu votes et ce que tu consommes ».

En effet, dans une société où les individus sont de plus en plus désaffiliés des partis, désalignés des offres politiques historiques, polarisées sur des questions fondamentales et dans laquelle les grilles de lecture par les déterminants sociaux-économiques ont perdu de leur puissance analytique (cf. les transformations du « vote ouvrier » ou la faiblesse des explications du vote par revenus), nous pensons qu’il est plus que jamais nécessaire de s’adapter et d’établir de nouvelles grilles d’analyse. La recherche en sciences sociales étant au cœur même de l’existence et de la création de Cluster17, nous continuerons à essayer d’œuvrer humblement au service de cette meilleure compréhension du « monde social ».

Pour faire le test et connaître votre cluster :

Pour découvrir tous les clusters :

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Baromètre des perceptions européennes pour le Grand Continent

Nous publions en exclusivité pour le Grand Continent notre premier « baromètre des représentations européennes ». Co-construite avec Emmanuel Rivière, ex DG de Kantar et vice-président de la Maison de l’Europe, cette étude réalisée simultanément en France, en Belgique, en Espagne, en Allemagne et en Italie éclaire sur le rapport des citoyens à des sujets fondamentaux tels que l’appartenance à l’UE, sa compétitivité, son bilan, ses compétences, sa défense militaire ou encore son rapport aux Etats-Unis version Trump.

  1. Rester ou sortir, là n’est plus la question. Le souhait de rester dans l’UE est largement majoritaire dans les 5 pays sondés. De même, le sentiment que l’appartenance à l’UE  renforce son propre pays fait consensus hormis en France où la société est divisée en deux sur cette idée. Dans l’ensemble de cette enquête, c’est en France que le niveau de critique et de scepticisme est le plus élevé.
  2. Des attentes de politiques concertées. Dans 7 des 12 domaines d’action testés, on trouve dans tous les pays une majorité, souvent large, pour estimer préférable une politique commune avec les autres pays de l’Union Européenne. C’est particulièrement le cas s’agissant de la lutte contre le terrorisme, de la recherche et de l’innovation, de la gestion des catastrophes et de la transition écologique. Cela reste vrai de l’immigration et des relations internationales, même si les Français sont plus hésitants sur ces deux aspects.
  3. Un bilan jugé décevant. Il existe peu de domaines d’action que les Européens considèrent comme des réussites. Il n’y a guère que la recherche qui suscite un satisfecit d’une majorité des sondés, et ce n’est même pas le cas en France, pays dont les habitants se montrent d’une manière générale particulièrement sévères, quand les Espagnols se montrent nettement plus positifs. A l’opposé de la recherche, l’immigration est unanimement associée à un constat d’échec. Dans les autres domaines, les constats sont un peu moins négatifs et varient significativement d’un pays à l’autre.
  4. Inefficace et bureaucratique, des reproches qui ont la vie dure Les critiques des citoyens se concentrent principalement sur l’absence d’efficacité de l’UE : seuls 15 à 28% des sondés estiment qu’elle est efficace. L’UE est à l’inverse perçue comme « bureaucratique » par une part importante de sondés, de 38 à 57% selon les pays. Cette insatisfaction n’est pas antinomique avec l’attachement au projet européen, mais débouche naturellement sur l’envie d’une autre Europe.
  5. Une autre Europe Environ 2/3 des sondés de chaque pays se disent ainsi favorables à l’UE tout en souhaitant « de grands changements » dans sa manière de fonctionner. Mais ce mécontentement ne se manifeste pas automatiquement par une envie de revenir en arrière dans l’intégration européenne : ainsi dans 4 pays sur 5 (sauf la France), le souhait d’aller vers une « Europe fédérale » est majoritaire.
  6. La difficile solidarité européenne Quand il s‘agit de qualifier l’Europe de « solidaire », les avis varient fortement d’un pays à l’autre (de 32% en Italie à 58% en Allemagne) et la question consistant à estimer si les Etats membres doivent accepter de contribuer plus qu’ils ne reçoivent de l’UE montre la complexité de la question. Le sujet fait débat, et partage les opinions publiques comme les pays : 57% des Allemands acceptent que leur pays soit contributeur net, quand 52% des Français le refusent. Pour une part, la solidarité européenne peut se heurter aux interrogations du grand public sur la fiabilité des autres partenaires.
  7. Le rapport Draghi, réponse nécessaire au défaut de compétitivité ? Environ deux tiers des Européens estiment que l’UE n’est pas compétitive, que ce soit par rapport aux Etats-Unis ou par rapport à la Chine. Ils souhaitent dès lors majoritairement que les pays se coordonnent davantage et ils sont plus de 50% à se dire en faveur du plan porté par Mario Draghi réclamant 800 milliards d’euros d’investissements dans des secteurs clés.
  8. Trump, la menace L’élection de Donald Trump est perçue comme une menace pour l’UE et pour l’Ukraine : 40 à 49% des sondés le considèrent comme un « ennemi de l’Europe » (contre 7 à 12% qui le considèrent comme un ami) et 41% (Italie) à 58% (Belgique) des sondés estiment que son élection rend le monde « moins sûr ».
  9. Ukraine : des lignes de faille les Européens sont partagés sur l’aide à apporter à l’Ukraine : 58% des Allemands souhaitent ainsi s’engager davantage pour défendre l’Ukraine contre seulement 31% des Italiens. En miroir, des divergences apparaissent concernant l’attitude à adopter vis-à-vis de la Russie. Si dans 4 pays sondés, la majorité s’exprime pour un renforcement ou à tout le moins un maintien des sanctions contre la Russie, une part significative de l’opinion italienne prône une normalisation de la relation.
  10. Des noyaux durs europhobes En France et en Italie, l’analyse par cluster fait apparaître des groupes d’électeurs particulièrement europhobes. Cette hostilité à l’égard de l’UE se conjugue à une défiance plus globale vis-à-vis de l’establishment dans des clusters qui peuvent être très différents sur d’autres clivages, les uns pouvant se situer à gauche et les autres à droite. Le phénomène est moindre en Allemagne et en Wallonie où l’europhobie est surtout l’apanage des électeurs de droite identitaire. En Espagne et en Flandre, le rapport à l’UE est moins structurant dans la construction des systèmes de valeurs et fait davantage consensus.

Retrouvez l’ensemble des résultats ci dessous :

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Jean-Yves Dormagen nommé représentant de la World Association for Public Opinion Research en France

Cluster17 a le plaisir d’annoncer que Jean-Yves Dormagen, fondateur et président de l’institut, a été nommé représentant officiel en France de la WAPOR (World Association for Public Opinion Research). Cette nomination marque une nouvelle étape pour Cluster17 dans son engagement à promouvoir l’excellence dans l’étude et l’analyse de l’opinion publique.

Jean-Yves Dormagen succède à Emmanuel Rivière, qu’il remercie chaleureusement pour son travail remarquable et son engagement en tant que précédent représentant.

La WAPOR, fondée en 1947, est une organisation internationale qui réunit des experts (sondeurs, chercheurs) du monde entier dans le domaine de la recherche sur l’opinion publique. L’association a pour mission de promouvoir l’usage rigoureux de la recherche scientifique dans la compréhension des attitudes, des comportements et des opinions des citoyens. Elle joue un rôle clé dans la diffusion des innovations méthodologiques et la mise en relation des professionnels de l’opinion publique à l’échelle mondiale. Elle s’engage aussi dans la défense de la liberté de sonder, tout particulièrement dans les pays où cette liberté est menacée ou entravée.

À travers cette nouvelle fonction, Jean-Yves Dormagen aura pour mission de renforcer les liens entre la communauté française des spécialistes de l’opinion publique et les membres du WAPOR, tout en favorisant le dialogue international sur les grands enjeux d’actualité. Sa nomination confirme la reconnaissance des travaux de Cluster17 dans le secteur des sondages d’opinion.

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Bilan des élections 2024 : Cluster 17 parmi les meilleurs instituts

Bilan des élections 2024 : Cluster 17 parmi les meilleurs instituts

Après des performances saluées en Espagne au printemps 2024 , Cluster 17 s’est une nouvelle fois classé parmi les meilleurs sondeurs français lors des élections européennes et législatives de 2024. Voici le bilan de cette séquence :

Élections Européennes 2024

Pour les élections européennes de 2024, Cluster 17 s’est classé deuxième avec une déviation totale de seulement 3,2. Cette performance place l’institut très près de la première place.  Toutes les formations politiques ont été bien estimées, avec aucun écart supérieur à un point pour chacune d’elles. 

Premier Tour des Élections Législatives

Lors du premier tour des élections législatives, Cluster 17 a encore une fois obtenu la deuxième place avec une déviation totale de 5,4. Ce résultat le place parmi les instituts les plus performants pour cette élection. 

 

Projection en Sièges au Second Tour des Législatives

Pour la projection en sièges suite au second tour des élections législatives, Cluster 17 a atteint la première place, avec un écart significatif par rapport à ses concurrents. Cette performance s’applique quel que soit le mode de calcul utilisé, que ce soit en fonction des groupes finaux déclarés à l’Assemblée nationale ou en tenant compte des chiffres officiels du Ministère de l’Intérieur. En effet, Cluster 17 a réalisé la meilleure estimation en sièges pour chacun des groupes politiques. Sur des données du Jeudi précédant l’élection et avec des tendances qui ont continué à évoluer, il a été le seul institut à prévoir la possibilité que le Nouveau Front Populaire (NFP) arrive en tête en nombre de sièges, avec une probabilité autour de 40%. L’ensemble des autres blocs politiques a également été très bien estimé.

 

Cluster 17 se félicite de ces résultats, qui prouvent une nouvelle fois la qualité et le sérieux méthodologique de son travail. La précision de ses estimations reflète l’engagement de l’institut à offrir les meilleures analyses possibles. Cluster 17 continuera à améliorer ses outils et ainsi lire l’opinion avec le plus de précision possible.

Avec ces performances, Cluster 17 renforce sa position dans le domaine des sondages électoraux en France, offrant des analyses fiables et précises, essentielles pour comprendre les dynamiques politiques du pays.

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