👉 Lire la note complète ici : Du vote légitimiste au vote identitaire : comment le RN est devenu le premier parti chez les seniors
Résumé :
Le RN est aujourd’hui le premier parti chez les retraités. Un phénomène analysé dans une note publiée pour la Fondation Jean-Jaurès par Stéphane Fournier, doctorant en science politique et analyste chez Cluster17. À partir des données Cluster17 et d’entretiens qualitatifs, il montre comment ce basculement s’est opéré.
Longtemps acquis à la droite républicaine, l’électorat des plus de 65 ans a peu à peu délaissé les partis traditionnels. Ce « vote légitimiste » — c’est-à -dire la fidélité aux sortants notamment à la droite et au centre-droit de gouvernement— s’effondre. À sa place, un vote plus marqué, plus clivé, qui penche de plus en plus du côté du Rassemblement National.
La progression du RN s’explique notamment par un fort conservatisme des seniors sur les sujets identitaires : immigration, islam, sécurité. Le « grey gap » est très net dans les chiffres : 84 % des seniors se disent ainsi par exemple favorables à l’interdiction du voile à l’université, contre 30 % chez les jeunes.
Le RN a su capter cette demande en adaptant son image et « nettoyant » son programme. Marine Le Pen a ainsi abandonné certains marqueurs perçus comme trop radicaux et qui pouvaient cliver les différentes sensibilités électorales de la droite, notamment les plus âgés et les plus libéraux économiquement (sortie de l’euro, retraite à 60 ans, alignement sur Moscou). En recentrant son discours et ses prises de position clivantes sur deux thématiques, celles de l’immigration et de la sécurité, le RN a su agréger des électeurs pour qui ces sujets sont absolument centraux dans le choix de vote.
Toutefois, la note se conclue sur les quelques limites qui subsistent. Le RN reste faible chez les « grands aînés » (75 ans et plus), et chez les retraités aisés, diplômés et plus modérés culturellement. Par ailleurs, une partie de cet électorat reste fidèle aux Républicains ou au bloc « macroniste ». Pour l’instant.
Le paysage politique pourrait encore évoluer si une alternative crédible à droite émergeait à l’issue du congrès des Républicains ou si le RN se voyait « rediaboliser » par la condamnation de Marine Le Pen. Mais en attendant, c’est bien le RN qui capitalise sur la déception à l’égard du bilan d’Emmanuel Macron et sur la polarisation à l’œuvre sur les questions identitaires.