Baromètre hebdomadaire S13 : Présidentielle 2022


Emmanuel Macron stable, Le Pen et Mélenchon boostés par le « vote utile »

Si Emmanuel Macron demeure stable et en tête à 27%, l’écart continue de se resserrer avec Marine Le Pen. La candidate du Rassemblement National gagne 1 point et grimpe à 18% des intentions de vote, son plus haut niveau depuis l’automne et le début de nos baromètres. Elle a mieux encaissé le choc de l’invasion militaire russe que son principal concurrent Éric Zemmour et commence à enclencher une dynamique de « vote utile ». Dans les deux clusters les plus volatils et les plus hésitants, les Conservateurs et les Anti-Assistanat, elle passe en tête. Chez les Conservateurs, elle double même son score en l’espace de deux semaines quand dans le même temps Emmanuel Macron, monté très haut au début de la guerre baisse largement. Idem pour Éric Zemmour qui divise son score par deux en l’espace de deux semaines dans ce cluster âgé, rural, votant continuellement à droite à chaque élection. Chez les Anti-Assistanat, c’est le même schéma qui se dessine. Éric Zemmour poursuit sa chute, ce qui bénéficie logiquement en premier lieu à Marine Le Pen. On observe dans ce cluster deux dynamiques quasi symétriquement opposées entre les deux candidats identitaires. Il y a un mois, au début de la guerre en Ukraine, ils étaient à égalité. Désormais, la candidate du RN est à 40% d’intention de vote dans ce cluster quand le candidat Reconquête est tombé à 12%. Par conséquent, Marine Le Pen profite non seulement de la fidélité de ses clusters populaires originels (Eurosceptiques, Réfractaires, Sociaux-Patriotes) mais elle commence à élargir sa base à des clusters jusqu’ici hésitants qu’il faudra surveiller jusqu’au dernier moment en raison de leur extrême volatilité et incertitude depuis 3 mois.

Jean-Luc Mélenchon bénéficie lui aussi d’une dynamique de vote utile. Elle se cantonne pour l’instant davantage aux clusters constituant son socle électoral depuis 2017 (Multiculturalistes, Révoltés, Solidaires). Il obtient des scores très élevés au sein de ces trois clusters. L’enjeu pour lui repose d’abord sur sa capacité à mobiliser cette base en continuant à capter une partie des électeurs de Fabien Roussel qui plait à une partie non négligeable des clusters mélenchonistes et tout particulièrement aux Solidaires. Mais il lui faut également capter une partie du vote Jadot notamment dans le cluster des Progressistes. Dans ce cluster jeune, urbain, diplômé, écologiste et très ouvert sur les enjeux culturels, J-L Mélenchon avait réussi à incarner le vote utile en 2017 obtenant 33% des voix juste derrière Emmanuel Macron. Aujourd’hui, il est à 22% juste devant Yannick Jadot à 15%. Enfin, il faudra voir si la percée observée cette semaine dans le cluster très populaire et dégagiste des Réfractaires se confirme pour J-L Mélenchon, auquel cas ce serait un signe positif pour lui, ce cluster étant resté jusqu’ici plus distant qu’en 2017, où 17% de Réfractaires avaient voté Mélenchon.

Pour ces deux candidats, le doute repose sur l’engouement autour de la campagne et la participation de leur base électorale, réputée très fragile. En effet, pour des raisons tenant à la sociologie de leur électorat, Marine Le Pen, comme Jean-Luc Mélenchon pourraient être grandement affaiblis par une abstention élevée. Capter le vote des Eurosceptiques et des Sociaux-Patriotes sera, en revanche, sans doute plus difficile pour le candidat insoumis. Dans la concurrence avec Marine Le Pen pour l’accès au second tour, ces clusters pourraient se révéler particulièrement décisifs.

L’enjeu de dimanche prochain sera de voir qui du vote utile ou de la sociologie électorale prendra le dessus. Le premier profiterait forcément à Le Pen (en cas de siphonnage du vote Zemmour) et Mélenchon (en cas de siphonnage du vote Jadot et Roussel) mais la seconde peut être, pour ces deux candidatures, extrêmement défavorable en cas de faible participation.

La menace de l’abstention différentielle défavorable

Les élections régionales ont montré que le risque permanent pour le RN est l’abstention de son électorat. Idem pour Jean-Luc Mélenchon qui peine à mobiliser sa base lors d’élections intermédiaires présentant moins d’enjeux, tout particulièrement les quartiers de grands ensembles où les Révoltés, qui lui sont largement acquis, sont surreprésentés mais pourraient peu voter dimanche prochain si l’abstention devait être élevée.

La sociologie de l’électorat de ces deux candidats est en effet propice à subir une abstention différentielle défavorable. On sait que lorsque l’abstention est forte, elle est exponentielle dans les électorats populaires et au sein de la jeunesse. Or, Marine Le Pen possède la base électorale la plus populaire : les clusters Eurosceptiques, Réfractaires et Sociaux-Patriotes sont trois clusters extrêmement populaires et antisystèmes. Les Réfractaires et les Eurosceptiques sont d’ailleurs ceux qui se disent le moins certains d’aller voter : 62% et 64%. Idem pour le cluster très populaire des Révoltés qui plébiscite J-L Mélenchon : seuls 63% se disent certains d’aller voter.

En outre, pour Jean-Luc Mélenchon, la structure par âge de son électorat pourrait lui être extrêmement préjudiciable en cas d’abstention particulièrement haute. En effet, il est le candidat préféré des moins de 34 ans. Ce vote « jeune » présente l’inconvénient qu’il est ordinairement bien plus abstentionniste. Si cet électorat se mobilisait peu le jour du vote, cela pourrait avoir des conséquences désastreuses pour lui et lui faire perdre mécaniquement de précieux points dans la course au 2nd tour.

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